« Je vous demande de ne pas paniquer et de ne pas commettre d’actes irréfléchis. Même si votre passeport expire, vous ne devez pas rentrer dans votre pays d’origine si vous risquez d’y être persécuté. » La cheffe des forces démocratiques biélorusses en exil, Svetlana Tsikhanovskaïa, a tenté, mardi 5 septembre, de rassurer les centaines de milliers de Biélorusses ayant quitté leur patrie pour fuir la répression. Leur sort est incertain avec l’entrée en vigueur, jeudi, d’un décret signé par le président biélorusse, Alexandre Loukachenko, qui interdit à ses concitoyens de renouveler leur passeport s’ils vivent à l’étranger.
Cette mesure accroît dangereusement la pression sur les opposants en exil, qui pourraient être obligés de revenir dans le pays afin de conserver leur précieux document. Ils ne pourront en effet obtenir un passeport, ou le renouveler, que dans « un service consulaire rattaché à leur dernier lieu de résidence enregistré » en Biélorussie, indique le décret. Celui-ci énonce d’autres restrictions : les propriétaires de biens immobiliers ou de voitures devront désormais être physiquement sur le sol national pour les vendre, ou produire une procuration signée dans le pays. Jusqu’ici, ces démarches pouvaient être réalisées dans le consulat biélorusse de leur pays d’accueil.
Vide juridique
On estime que de 200 000 à 300 000 personnes ont quitté la Biélorussie ces trois dernières années pour fuir les persécutions. Avec ce décret, ce sont ces exilés que le régime cible. La nouvelle législation menace de les laisser dans un vide juridique à l’expiration de leur passeport. « Nous travaillons avec les pays hôtes pour résoudre la situation et préparer le nouveau passeport biélorusse, a assuré Mme Tsikhanovskaïa sur la plate-forme Telegram. Si l’État abandonne son devoir de s’occuper de ses citoyens, ce ne sera pas notre cas ! » En attendant, « la Pologne et la Lituanie ont déjà commencé à délivrer ce que l’on appelle le passeport étranger comme document de voyage aux Biélorusses dont le passeport est expiré ou à court de pages », a-t-elle précisé.
Ces derniers mois, la Biélorussie avait déjà adopté une loi, promulguée le 5 janvier, permettant de retirer leur citoyenneté aux Biélorusses en exil jugés coupables de « participation à des activités à caractère extrémiste ou qui ont causé du tort aux intérêts de la Biélorussie » – une accusation utilisée pour condamner ceux qui se sont érigés contre le dictateur, au pouvoir depuis 1994. Selon Anatol Kotau, ancien membre du régime passé à l’opposition, cette loi constituait « la première étape vers une privation générale de documents pour les Biélorusses à l’étranger ». Le décret présidentiel, signé lundi, marque la deuxième étape.
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